samedi 9 juillet 2016

Paul Valéry: Quelques considérations sur l'art poétique

Paul Valéry
Quelques considérations sur l'art poétique

Le poète ne part pas d'une idée ou d'un sentiment pour chercher ensuite les mots, les images et les rythmes appropriés. Fond et forme sont liés de façon indissoluble, ou, s'il est légitime de les distinguer, c'est la forme qui précède le fond.
(...) La poésie est l'ambition d'un discours qui soit chargé de plus de sens, et mêlé de plus de musique, que le langage ordinaire n'en porte et n'en peut porter. Rien de plus simple à concevoir que le désir d'accroître indéfiniment cette charge de merveilles, qui se superpose, ou se substitue, à la charge utile du langage. Mais cet accroissement a des limites qui s'atteignent aisément; l'équilibre qu'il faut maintenir dans le lecteur, entre l'effort qu'on en exige et les forces qu'on lui suggère, ne demande qu'à se rompre. L'obscurité, d'une part; l'inanité de l'autre; le vague excessif, l'absurde, la singularité personnelle exagérée, tous les dangers qui ne cessent de veiller étroitement autour des ouvrages de l'esprit menacent spécialement les poèmes et les sollicitent vers les abîmes de l'oubli.
(...) la poésie n'a pas le moins du monde pour objet de communiquer à quelqu'un quelque notion déterminée, - à quoi la prose doit suffire. (...) En somme, le sens, qui est la tendance à une substituion mentale uniforme, unique, résolutoire, est l'objet, la loi, la limite d'existence de la prose pure.
Tout autre est la fonction de la poésie. Tandis que le fond unique est exigible de la prose, c'est ici la forme unique qui ordonne et survit. C'est le son, c'est le rythme, ce sont les rapprochements physiques des mots, leurs effets d'induction ou leurs influences mutuelles qui dominent, aux dépens de leur propriété de se consommer en un sens défini et certain. Il faut donc que dans un poème le sens ne puisse l'emporter sur la forme et la détruire sans retour ; c,est au contraire le retour, la forme conservée, ou plutôt exactement reproduite comme unique et nécessaire expression de l'état ou la pensée qu'elle vient d'engendrer au lecteur, qui est le ressort de la puissance poétique. Un beau vers renaît indéfiniment de ses cendres, il redevient, - comme l'effet de son effet,- cause harmonique de soi-même.

vendredi 8 juillet 2016

Premier jour au Festival d'Été de Québec

Traitement VIP au Festival d'été de Québec, où j'ai pu me rendre en voiture, conduite de main de maître par ma sister qui portait un ravissant ensemble Chanel.
Ouverture du Festival en présence du pittoresque maire de Québec, Marcel Brochu, si connu et apprécié, et une foule, congelée par le froid et le vent, estimée à vingt millions de personnes, peut-être moins, qui a pris son temps pour arriver et manquer la première partie d'une participante de La Voix : la toute jeune et pétillante Cardin Charlotte qui s'en est bien tirée malgré tout.
Sa voix rappelle Coeur de Pirate sans les tatouages et la chanteuse de Portishead qu'elle a dû écouter dans le ventre de sa mère. On lui souhaite une belle carrière... bah, on s'en fout, je ne dis pas si elle était dans mon lit (improbable).
Puis sont arrivés les deux dinosaures du pop-rock, rock-pop progressif slash reggae, recyclé sauce Police, slash rythme africain je milite pour l'Afrique du Sud. Deux grosses pointures, surtout Gabriel qui doit faire dans les 160 livres, qui ont fait l'effort de s'exprimer dans la langue des pauvres.
Pendant deux heures se sont enchaînés sans qu'on ne s'ennuie trop, une pléthore de méga succès radio, vidéo, radio cassette, qui fleurait bon les années 80. Bon, moi, je n'étais pas né (?), mais j'ai entendu parler de cette époque mythique.On retient surtout "Don't give up", émouvant duo, où j'avais les larmes aux yeux à cause d'une graine et du vent, Roxanne, An Englishman à New York, Sledghammer, et patati et patata, Manon viens danser le ska, etc.
De la belle musique, bien jouée, par des musiciens qui connaissent leur boulot et qui sont payés au tarif syndical.
Ensuite, il se fit tard et nous reprîmes le chemin vers la chaleur de la ville, après avoir mis entre parenthèses pendant quelques heures, malgré le froid, l'absurdité de la vie et de la condition humaine.