Il n'est plus possible de créer librement aujourd'hui. Nous sommes trop conditionnés par le marxisme culturel, la rectitude politique, comme on le nomme plus communément.
C'est particulièrement vrai dans le cinéma commercial américain ou britannique.
Les personnages sont choisis pour flatter et renforcer le contexte idéologique de notre millénaire, passer des messages à peine subliminaux.
Le cinéma d'auteur échappe sans doute à cette tendance, en partie, mais ce n'est pas certain.
Dans les années soixante, le cinéma, même celui des grands studios, avaient une sorte d'innocence. On faisait de la prose sans le savoir et on proposait des héros qui exprimaient inconsciemment leur époque.
C'est ainsi que Ian Fleming a créé le héros par excellent de la guerre froide : James Bond, l'agent secret 007.
Ian Fleming était un officier du renseignement naval pendant la Deuxième Guerre Mondiale.
Encore auréolé d'avoir vaincu le nazisme, l'homme occidental pouvait encore pleinement exister sans avoir peur d'être rabaissé. Il était assez macho pour tuer impitoyablement ses ennemis, puis il séduisait sans effort toutes les femmes qui admiraient sa virilité.
C'était la belle époque : on fumait, on baisait sans capote, on montrait ses muscles, et personne n'y trouvait à redire.
Sean Connery collait parfaitement au rôle, puis des conflits avec les producteurs de la série, et son désir de jouer d'autres personnages, ont amené d'autres acteurs à incarner James Bond.
En 1969, année érotique et hippie, le rôle fut donné à George Lazenby qui, influencé par la culture ambiante du Swinging London, se présenta à la première avec les cheveux longs et un style décontracté.
La féminisation de la société, le mouvement pacifiste engendré par la guerre du Vietnam, avait rendu l'agent secret dépassé. L'époque était à la remise en question de l'ordre établi et non pas à sa protection par un super agent secret jugé ringard.
Les James Bond des années 80, Roger Moore et Pierce Brosnan, n'ont jamais pleinement remplacé l'Écossais Sean Connery. Ils font trop sophistiqués et même un peu efféminés, comme le sont souvent les Anglais purs britishs.
Le nouveau James Bond, Daniel Craig, à partir de 2006 (Casino Royale, Quantum of Solace), veut renouer avec ce côté ultra viril, mais il ne réussit qu'à être brutal et violent. De plus, on l'a "accouplé" avec une nouvelle incarnation de M, une femme, Julie Dench, sa supérieure castratrice (c'est elle qui
mène!), qui n'inspire que froideur, comme s'il fallait en rajouter et montrer que les femmes en avaient aussi!
(On retrouve cette tendance dans les films de Kathryn Bigelow. Oui, je suis une femme, mais je peux assumer le pouvoir et torturer, et tuer, aller à la guerre.)
Donc, peut-on affirmer que la masculinité est maintenant assumée autant par les femmes que par les hommes? La masculinité de James Bond s'exprimait dans cette tension entre le tueur et le séducteur. Il était capable de distance humoristique.
Le nouveau James Bond n'a plus cette dualité et semble inepte à la nuance des sentiments et son pendant féminin, M, est son semblable sous sa forme féminine. S'il n'y a plus de différence entre le féminin et le masculin, tous y perdent.
Le monde occidental ne va pas revenir en arrière, mais puisse-t-il revenir à la spontanéité et au flou artistique qui réussit si bien à la vraie création. Il 'y a pas de création sans liberté.
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